lingvo.wikisort.org - Langue

Search / Calendar

Le Croissant (autonyme : Le Croissant[1]) est une aire linguistique de transition entre la langue occitane et la langue d'oïl située dans le Centre de la France[2],[3].

Croissant
Pays France
Région Charente, Vienne, Haute-Vienne, Indre, Creuse, Cher, Puy-de-Dôme, Allier
Classification par famille
Carte

Aire linguistique du Croissant entre langue d'oïl et langue d'oc.

Les parlers occitans et de langue d'oïl s'y rejoignent et s'y mélangent pour y former une langue intermédiaire[4] entre ces deux ensembles linguistiques[5],[6].

Le nom est dû aux contours de cette zone qui évoquent un croissant. Le premier auteur qui a utilisé le terme de Croissant fut le linguiste Jules Ronjat, dans sa thèse de 1913[7].

Deux grands dialectes croissantais s'y trouvent. Le marchois, qui se rapproche davantage du limousin, à l'ouest va du Confolentais (Charente) jusqu'à Montluçon et sa région (ouest de l'Allier/Gorges du Cher) en passant par le nord de la Creuse et Guéret[8],[9],[10],[11]. Les deux-tiers est du Bourbonnais méridional forment, quant à eux, le bourbonnais du Croissant au sens strict, centrés autour de Chantelle et Vichy, et reçoivent des influences du francoprovençal[12].


Le territoire


Aire linguistique du Croissant selon l'Atlas sonore des langues régionales (CNRS, 2022)[13].
Aire linguistique du Croissant selon l'Atlas sonore des langues régionales (CNRS, 2022)[13].

Le territoire du Croissant a approximativement la forme d'un croissant effilé qui rejoint la vallée de la Tardoire en Charente à l'ouest, aux Monts de la Madeleine dans le département de l'Allier à l'est[14]. Ce croissant est très fin entre sa pointe occidentale et Le Dorat (entre 10 et 15 km de large), et s'élargit ensuite jusqu'à l'est : entre 30 km (au niveau de Guéret) et 50 km (au niveau de Montluçon)[15].

Les villes du Croissant les plus importantes du Croissant sont Guéret[16], Montluçon et Vichy[17].


Classification



Historiographie


Carte de Tourtoulon et Bringuier, 1875. Les zones A et B sont des sous-dialectes du marchois.
Carte de Tourtoulon et Bringuier, 1875. Les zones A et B sont des sous-dialectes du marchois.

Cette zone linguistique a longtemps été considérée de diverses manières par l'historiographie du XIXe et XXe siècle

Pour Tourtoulon & Bringuier, Dahmen, Simone Escoffier, & Olivier il s'agit d'un espace de langue d'oc de transition avec la langue d'oïl.

Jules Ronjat exprime un avis plus prudent en refusant de dire explicitement si le Croissant relève plus de la langue d'oc ou de la langue d'oïl (français). De la même manière et plus récemment, différents linguistes occitanistes comme Pierre Bec ou Robert Lafont sont plus prudents et ont décidé de ne pas inclure directement le Croissant dans le domaine occitan[18].

L'Atlas linguistique de la France enregistrait à la fin du XIXe siècle l'intégralité du Croissant comme un espace de langue d'oïl.


Recherches actuelles


Les années 2010 et 2020 ont vu la création de groupe de recherches universitaires centrées sur les parlers du Croissant (CNRS) et ont permis de mieux comprendre la place linguistique qu'occupe le Croissant. Il est actuellement considéré comme une zone linguistique intermédiaire où les parlers occitans et d'oïl se rejoignent et se mélangent. Ils possèdent des traits communs aux deux langues[19].

Zones linguistiques de transition des langues occitano-romanes avec leurs voisines romanes selon Domergue Sumien.
Zones linguistiques de transition des langues occitano-romanes avec leurs voisines romanes selon Domergue Sumien.
Langues d'oïl et Croissant.
Langues d'oïl et Croissant.

Ils sont néanmoins à l'origine des parlers occitans où s'est exercé depuis plusieurs siècles (Moyen Âge) une très forte influence de la langue d'oïl, ce qui a abouti à leur situation actuelle de transition entre ces deux langues[20].

L'Atlas des langues régionales de France (CNRS) qui reprend également cette idée[21].

Guylaine Brun-Trigaud est une des spécialistes de cette aire linguistique et y inclut également les parlers d'oïl avec des traits occitans[22].


Évolution historique, territoriale et linguistique


Espace nord-ouest de l'ancien occitan au Moyen Âge. L'arrivée du français se fait de manière très précoce dans les actes médiévaux notamment du Bourbonnais.
Espace nord-ouest de l'ancien occitan au Moyen Âge. L'arrivée du français se fait de manière très précoce dans les actes médiévaux notamment du Bourbonnais.

Le Croissant existe depuis le Moyen Âge comme en attestent les dernières recherches[23]. En effet, les influences du français sont anciennes dans le Croissant : dès la seconde moitié du XIIIe siècle, les documents administratifs et juridiques y ont été écrits en français et non dans le dialecte local, aussi bien dans la Marche qu'en Bourbonnais.

Dans ce qui deviendra le Bourbonnais, les premiers documents écrits connus en langue vulgaire sont des actes en français avec quelques formes occitanes insérées, à partir du XIIIe siècle. Il est probable qu'en Berry le Croissant devait se situer plus au nord au Moyen Âge. En ce qui concerne le Bourbonnais, la situation n'a pas beaucoup bougé depuis le Moyen Âge[24],[25], le Croissant s'est toutefois déplacé au sud en direction du nord de l'Auvergne mais, encore une fois, dès le Moyen Âge final[26],[27].

L'avancée du français (oïl) vers le Croissant est un phénomène long et progressif, il est différent de la désoccitanisation assez rapide du Poitou, de la Saintonge et de l'Angoumois qui se fit entre les XIIe et XVe siècles, due principalement aux repeuplements consécutifs aux ravages de la guerre de Cent Ans.


Subdivisions dialectologiques


Articles détaillés : Marchois (dialecte) et Bourbonnais (dialectes).
Le Croissant oriental (marron) en Bourbonnais (Atlas sonore des langues régionales, CNRS, 2022).
Le Croissant oriental (marron) en Bourbonnais (Atlas sonore des langues régionales, CNRS, 2022).

Les parlers du Croissant sont relativement hétérogènes mais sont souvent généralement découpés en deux « dialectes » différents : le marchois à l'Ouest et le bourbonnais du Croissant à l'est.


Les traits des parlers du Croissant


Les parlers du Croissant sont assez hétérogènes (selon Ronjat) mais on y trouve à la fois des caractéristiques occitanes et d'oïl :


Graphies


Langues d'oïl et Croissant.
Langues d'oïl et Croissant.

Plusieurs grands systèmes d'écritures peuvent être utilisées pour écrire les parlers du Croissant car ils peuvent être assimilés aux deux grandes familles linguistiques voisines, langue d'oc et langue d'oïl, et donc utiliser leurs écritures respectives[30],[31],[32]. Ces graphies sont encouragées par le groupe de recherche sur les parlers du Croissant (CNRS) :


Notes et références


  1. Prononcé « Crouéssant ».
  2. « Atlas sonore des langues régionales de France », sur https://atlas.limsi.fr/ ; site officiel de l'Atlas sonore des langues régionales de France,
  3. Maximilien Guérin, « Transmission et dynamique des parlers du Croissant », Cahiers du Groupe d'études sur le plurilinguisme européen, Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, no 12, (ISSN 2105-0368, lire en ligne)
  4. Maximilien Guérin, Michel Dupeux, Parlons bas-marchois - Une langue de transition entre oc et oïl, Paris, L'Harmattan, coll. « Parlons », , 220 p. (ISBN 978-2-14-027676-7, EAN 9782140276767).
  5. Les parlers du Croissant (groupe de recherches universitaires et académiques en linguistiques sur les parlers du Croissant ; CNRS)
  6. Guylaine Brun-Trigaud, « Les parlers marchois : un carrefour linguistique », Patois et chansons de nos grands-pères marchois. Haute-Vienne, Creuse, Pays de Montluçon (dir. Jeanine Berducat, Christophe Matho, Guylaine Brun-Trigaud, Jean-Pierre Baldit, Gérard Guillaume), Paris, Éditions CPE, (ISBN 9782845038271)
  7. Jules Ronjat, Essai de syntaxe des parlers provençaux modernes, par Jules Ronjat,..., Protat frères, , 306 p. Disponible en ligne (University of Toronto - Robarts Library).
  8. Nicolas Quint, « Aperçu d'un parler de frontière : le marchois », Jeunes chercheurs en domaine occitan, Montpellier, Presses universitaires de la Méditerranée (Université Paul-Valéry), , p. 126-135 (lire en ligne)
  9. (fr + oc) Patois et chansons de nos grands-pères Marchois (Haute-Vienne, Creuse, pays de Montluçon), Paris, Éditions CPE, , 160 p. (ISBN 9782845038271)
  10. (en) Linguasphere Observatory, The Linguasphere Register - The indo-european phylosector, Linguasphere Observatory, 1999-2000 (lire en ligne), p. 402
  11. Dominique Caubet, Salem Chaker, Jean Sibille, « Le marchois : problèmes de norme aux confins occitans », Codification des langues de France. Actes du colloque Les langues de France et leur codification organisé par l'Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco, Paris, Mai 2000), Paris, Éditions L'Harmattan, , p. 63-76 (ISBN 2-7475-3124-4, lire en ligne)
    • Simone Escoffier, La rencontre de la langue d’oïl, de la langue d’oc et du franco-provençal entre Loire et Allier: limites phonétiques et morphologiques, 1958 [thèse], Mâcon, impr. Protat [éd. identique de la même année: coll. Publications de l’Institut de Linguistique Romane de Lyon-vol. 11, Paris: Les Belles Lettres]
    • Simone Escoffier, Remarques sur le lexique d’une zone marginale aux confins de la langue d’oïl, de la langue d’oc et du francoprovençal, 1958, coll. Publications de l’Institut de linguistique romane de Lyon-vol. 12, Paris: Les Belles Lettres
  12. (en) Philippe Boula de Mareüil, Frédéric Vernier, Albert Rilliard, « A Speaking Atlas of the Regional Languages of France », Proceedings of the Eleventh International Conference on Language Resources and Evaluation (LREC 2018), Miyazaki, , p. 4134-4138 (lire en ligne)
  13. Philippe Boula de Mareüil, Gilles Adda, Lori Lamel, « Comparaison dialectométriques de parlers du Croissant avec d’autres parlers d’oc et d’oïl », Le Croissant linguistique entre oc, oïl et francoprovençal : des mots à la grammaire, des parlers aux aires, Paris, L'Harmattan, (ISBN 978-2-343-23050-4, lire en ligne)
  14. Russo Michela, Prémat Timothée, « Voyelles finales et traits- φ a la rencontre des diasystemes d’oïl, d’oc et du francoprovençal », Verbum, Nancy, Université de Lorraine, (lire en ligne)
  15. Jean-Pierre Baldit, Les parlers creusois, Guéret, Institut d'études occitanes, (OCLC 799327135)
  16. « 2e rencontres sur les parlers du Croissant », sur https://www.montlucon.com/ ; site officiel de la ville de Montluçon, (consulté en )
  17. Pierre Bec, La Langue occitane (Presses universitaires de France, collection Que sais-je ? no 1059, 128 pages (1963, 5e édition 1986, 6e édition corrigée , épuisé) (ISBN 2-1303-9639-9).
  18. Philippe Boula de Mareüil, Gilles Adda (Limsi, CNRS), « Comparaison de dialectes du Croissant avec d’autres parlers d’oïl (berrichon-bourbonnais et poitevin-saintongeais) et d’oc », communication au colloque « 2èmes Rencontres sur les Parlers du Croissant », Montluçon, 2019, [lire en ligne].
  19. Maximilien Guérin, « Les parlers du Croissant : des parlers minorisés et marginalisés », Promotion ou relégation : la transmission des langues minorisées d’hier à aujourd’hui, Université de Poitiers, (lire en ligne)
  20. « Atlas sonore des langues régionales de France - Zone du Croissant », sur https://atlas.limsi.fr/ ; site officiel de l'Atlas sonore des langues régionales de France,
  21. Guylaine Brun-Trigaud, « Les enquêtes dialectologiques sur les parlers du Croissant : corpus et témoins », Langue française, vol. 93, no 1, , p. 23-52 (lire en ligne, consulté le ).
  22. Anthony Lodge, « Le clivage oc-oïl au Moyen Âge : fiction méthodologique », Mélanges de l'École française de Rome, Rome, École française de Rome, vol. 117-2, , p. 595-613 (lire en ligne).
  23. Géraud Lavergne, Le parler bourbonnais aux XIVe et XVe siècles, Paris ; Moulins, Champion (Paris) ; Grégoire (Moulins),
  24. Thomas A., « Géraud Lavergne, archiviste paléographe. Le parler bourbonnais aux XIVe et XVe siècles. Étude philologique de textes inédits » ([compte-rendu d'ouvrage]), Romania, Paris, vol. 153, , p. 106-108 (lire en ligne)
  25. Lucien Febvre, « Max Derruau : La Grande-Limagne auvergnate et bourbonnaise » ([compte-rendu d'ouvrage]), Annales, vol. 5-4, , p. 539-541 (lire en ligne)
  26. Max Derruau, La Grande-Limagne auvergnate et bourbonnaise, Clermont-Ferrand, Delaunay,
  27. Jean-Pierre Baldit, « Les parlers de la Marche. Extension et caractéristiques », Patois et chansons de nos grands-pères marchois. Haute-Vienne, Creuse, Pays de Montluçon (dir. Jeanine Berducat, Christophe Matho, Guylaine Brun-Trigaud, Jean-Pierre Baldit, Gérard Guillaume), Paris, Éditions CPE, , p. 22-35 (ISBN 9782845038271)
  28. Jean-Pierre Baldit, « Quelle graphie utilisée pour le marchois ? », Patois et chansons de nos grands-pères marchois. Haute-Vienne, Creuse, Pays de Montluçon (dir. Jeanine Berducat, Christophe Matho, Guylaine Brun-Trigaud, Jean-Pierre Baldit, Gérard Guillaume), Paris, Éditions CPE, , p. 84-87 (ISBN 9782845038271)
  29. Maximilien Guérin, Michel Dupeux, « Comment écrire le bas-marchois ? », Mefia te ! Le journal de la Basse-Marche, no 5, (lire en ligne)
  30. Maximilien Guérin, Cécilia Guérin, « Le Croissant : une zone de transition linguistique au nord de l’aire occitane. La question de l'orthographe », Patrimòni, Alrance, no 90, , p. 25-31 (ISSN 1779-0786, lire en ligne)
  31. Bibliographie des productions du groupe de recherche sur les parlers du Croissant ; CNRS, 2020.

Voir aussi



Articles connexes



Bibliographie


Liste non-exhaustive par ordre alphabétique (noms de famille).

francoprovençal », Verbum, Nancy, Université de Lorraine, (lire en ligne).


Liens externes





Текст в блоке "Читать" взят с сайта "Википедия" и доступен по лицензии Creative Commons Attribution-ShareAlike; в отдельных случаях могут действовать дополнительные условия.

Другой контент может иметь иную лицензию. Перед использованием материалов сайта WikiSort.org внимательно изучите правила лицензирования конкретных элементов наполнения сайта.

2019-2024
WikiSort.org - проект по пересортировке и дополнению контента Википедии